Management : les vertus de l’autorité

Le management peut il se passer de l’autorité ? Faut il choisir entre Bienveillance et Autorité ?

Lors de mes missions d’accompagnement en entreprise, je rencontre fréquemment des managers mal à l’aise avec la notion d’autorité.

Il faut dire que le terme ne fait pas souvent la une des livres et formations dédiées au management qui valorisent plus souvent les notions de bienveillance, d’autonomie, ou encore de responsabilisation.

L’autorité est fréquemment vue comme un défaut, ou lorsqu’elle est admise, comme un attribut dont il ne faut pas abuser ! Alors, que devons-nous en penser ? L’autorité va-t-elle à l’encontre d’un management bienveillant et participatif prôné par beaucoup d’entreprises aujourd’hui ? Est-ce une vision passéiste et dépassée du management ? Faut-il en avoir peur ?

Qu’est ce que l’autorité ?

L’autorité se définit comme le pouvoir de se faire obéir sans recours à la contrainte physique ou morale.

C’est le crédit, l’influence, le pouvoir dont jouit le manager du fait de sa valeur, de son expérience, de son rôle et de sa position au sein de l’entreprise.

Selon Alexandre KOJEVE, l’autorité s’incarne selon quatre figures symboliques :

Le juge

La figure du « Juge » garant des règles et de l’équité au sein du collectif (légitimité rationnelle),

Le Maître

La figure du « Maître » apportant sa connaissance et son savoir-faire (légitimité rationnelle),

Le Chef

La figure du « Chef » porteur d’une vision et qui entraîne le collectif derrière lui (légitimité émotionnelle),

Le Père

La figure du « Père » incarnant la protection et l’exigence bienveillante (légitimité émotionnelle).

Selon son expérience, son âge, sa sensibilité, ses compétences, chaque manager va asseoir son autorité (on peut parler de légitimité) par la combinaison de ces quatre dimensions.

L’autorité correspond donc moins à une qualité personnelle qu’à une attribution qui vient légitimer son pouvoir d’être obéi.

Comment et dans quel but exercer son autorité ?

 « Être roi est idiot. Ce qui compte, c’est de faire un royaume » : André Malraux

La question que peut se poser un manager n’est donc pas tant de savoir s’il faut avoir de l’autorité ou non, mais plutôt de comprendre COMMENT et POUR QUOI exercer cette autorité qui lui est attribuée.

L’autorité, dans sa forme brutale et lorsqu’elle est mise au service de sa propre personne, s’apparente à de l’autoritarisme. Dans cette configuration, elle n’est pas créatrice de valeurs pour l’entreprise et ne peut durer qu’en étant associée à une forme de contrainte physique ou morale.

A contrario, une autorité, associée à des principes de bienveillance et de responsabilisation, puis mise au service de l’autre et du collectif, constitue un formidable outil managérial.

Il est intéressant d’ailleurs de noter que le terme « autorité » est construit à partir du verbe latin augere qui signifie augmenter, entretenir, amplifier, d’où dérive auctor signifiant auteur, fondateur, créateur…

L’usage de l’autorité est une question d’équilibre. Elle donne toute sa puissance lorsqu’elle est associée aux autres qualités du manager.

La bienveillance sans l’autorité peut se transformer en complaisance.

Une autorité qui s’exerce sans aucune bienveillance se transforme en autoritarisme.

La responsabilisation sans le cadre de l’autorité peut se transformer en individualisme.

Une autorité qui s’exerce sans aucune responsabilisation nuit à la confiance.

Une vision collective sans la force de conviction que produit l’autorité ne rassemble pas.

Une autorité qui ne sert pas un but collectif perd de sa légitimité.

Comment développer son autorité ?

Une autre idée reçue sur l’autorité serait qu’à l’instar de son cousin, le charisme, il y a ceux qui en ont et ceux qui n’en ont pas.

Pourtant, comme nous venons de le voir, l’autorité correspond moins à une qualité personnelle innée qu’à une attribution que nous confère notre position, notre rôle, notre expérience, notre savoir-faire…

L’autorité est donc avant tout un attribut personnel dont nous devons prendre conscience, intégrer et assumer.

Cela devient alors un outil puissant qu’il ne tient qu’à nous d’utiliser à bon escient.

Pour un manager, le chemin qui mène à l’exercice assumé d’une autorité confiante, saine et légitime passe par 4 étapes :

1

Prendre conscience des éléments qui me confèrent une autorité aux yeux de mon équipe ou de ma hiérarchie (une légitimité à décider, agir, arbitrer…)

C’est certainement l’étape la plus importante. Elle nécessite une prise de conscience et une acceptation de l’autorité que nous confère notre rôle et position.

Assumer son autorité est le premier pas vers une utilisation confiante, saine et légitime.

Pour cette étape, il est possible de s’appuyer sur les quatre figures d’autorité développés par Alexandre Kojeve (Juge, Maître, Chef et Père)

  • Quels sont les éléments sur lesquels je m’appuie naturellement ?
  • Quels sont ceux que je n’ai pas suffisamment intégrés ?

2

Définir l’usage que je souhaite faire de mon autorité et la création de valeurs associée

3

Transposer opérationnellement ces éléments dans les différentes dimensions et situations managériales

Lorsque je suis en situation de management individuel, ou en situation d’animation collective, ou encore pour définir et porter la vision collective…


Qu’est ce qu’une autorité confiante, saine et légitime me permettra…
… de faire demain que je ne fais pas aujourd’hui.
… de ne plus faire demain.
… de faire différemment demain.

4

Mettre en œuvre, expérimenter, tester, ajuster, recommencer…

Et vous, sur quoi fondez vous votre autorité et quel usage en faites-vous ?